Lettre à un ami inconnu et malentendant

Publié le par Bertrand Tremblay

Lettre à un ami inconnu et malentendant

2014-07-14

Lettre à un ami inconnu et malentendant

Objet : Nicole

Bonjour cher ami,

Si je t’écris, c’est que je ressens une émotion aux contours négatifs. Au lieu de la réprimer, ce qui à la longue devient douloureux et est facteur de déclenchement d’une action regrettable chez-moi, je préfère te la partager.

Cette émotion est reliée à des réactions personnelles causées dans le cadre de ma participation, à titre de membre, à des activités de plein air organisées par le club d'une île périphérique à une métropole. Je me sens frustré du comportement d’une fille. Elle s’appelle Nicole. Elle est amatrice de sport, dont le golf et la bicyclette, comme moi. De plus, elle a une sœur malentendante comme moi. Comme toute femme, elle avait son propre charme, ce qui peut séduire, mais pas au point que j’en devienne aveugle.

Cette frustration pourrait être positive si elle s’accompagnait d’une action de clarification ou d’une vigoureuse discussion auprès de Nicole. Probablement, il en résulterait de la compréhension de sa part. De mon côté, je me sentirais calmé. L’exercice n’est pas possible en ce moment. Probablement, cher ami, y verras-tu dans cette lettre un soupçon de négativité pour cette raison. Je m’explique.

Dimanche dernier, eut lieu le circuit cycliste dans les environs de Venise. Nicole, à qui j’offris le covoiturage car j’étais équipé d’un support à vélo pour deux personnes, et moi, nous allâmes ensemble au point de départ de la randonnée de vélo, à Venise. Par point de départ, il y a lieu d’entendre l’endroit où débuta la randonnée.

Quand je vis Nicole au-devant de l’édifice appartement où elle logeait, elle m’apprit que son vélo avait été volé durant la nuit précédente. Je lui prêtai mon deuxième vélo (hybride) pour lui permettre de réaliser cette randonnée. Tout cela, vélo et déplacement en automobile, fut offert gracieusement à Nicole. Jusque là, tout se déroula correctement.

Au retour de la randonnée, j’appris que Nicole n’avait ni auto, ni vélo. Ainsi elle ne pouvait pas se déplacer, sauf à pied. Je lui prêtai mon vélo pour la période nécessaire à l’achat d’un nouveau vélo. Nicole me paya 20 $ pour ce prêt de même que pour l'excursion à Venise. Je refusai, car j’interprétai son geste comme une manière de débarras ou d’affaire, mais en vain. Elle allégua que ce m’était du, tant le déplacement que le prêt du vélo. S’il n’y avait pas eu de suite à ce monnayage, je n’aurais rien eu à redire.

Tu verras plus loin, cher ami, que tel ne fut pas le cas et tu comprendras pourquoi. Au lendemain, Nicole et moi nous sommes revus lors d’une autre randonnée prévue au programme : randonnée de Sainte-Anne du Lac. Après les échanges amicaux de base, comme l’achat par elle d’un nouveau vélo et de sa récupération, nous entreprîmes la randonnée selon notre rythme de route : moi assez rapide et toujours vers l’avant; elle à l’arrière, et nous nous arrêtâmes, tout le groupe, soit pour la visite d'une ferme d'élevage, soit pour le lunch, soit pour notre regroupement après un parcours souvent épars.

Le comportement de Nicole me sembla discutable lors de ces arrêts. Par exemple, lors de la visite de la ferme, il arrivait que je me rapprochais involontairement d’elle et que je profitais de l’occasion pour partager mes idées ou opinions. Elle ne me répondait pas et s’éloignait prestement de moi. Par crainte de brusquer sa pudeur, je la laissai agir comme elle l’entendait.

Lors du dîner à l’extérieur, je m’assis à un bout d’une longue table de pique-nique. Quant à Nicole, elle s’installa à la limite opposée de cette dernière. Elle semblait toujours faire en sorte que nous soyions isolés l’un de l’autre. En outre, après un parcours d’une dizaine de kilomètres, à un parc situé à mi-chemin entre Sainte-Anne et l’île, nous nous regroupâmes. À cet endroit, une personne tenta de déterminer parmi nous ceux qui serait disponible pour covoiturage le lendemain. À ce moment-là, je me trouvais près de Nicole. Quand vint notre tour, la personne s’adressa à moi ainsi qu’à elle. Je pressentis, dans le geste de cette dernière, le non-désir de covoiturer avec moi. N’avais-je pas raison, cher ami, de douter de sa bonne foi.

Lors de notre échange amical à son arrivée en train à Sainte-Anne, Nicole m’apprit qu’elle récupérerait son vélo de l'autre côté de l'île, où est situé le magasin, dès la semaine suivante. Nous convînmes de nous y rendre ensemble en automobile, étant donné que je devais faire ajuster mon vélo. Nicole proposait de revenir à l’île en vélo, alors que moi je n’avais d’autre choix que d’effectuer mon retour en auto.

Peu confortable avec cette suggestion, j’osai discuter à ce sujet avec elle. Par exemple, je proposai qu’on s’y rende en métro ensemble et que l’on revienne en vélo à l’île. Dans l’immédiat, il n’y eut pas de réplique de sa part. Toutefois, plus tard, Nicole revint à la charge et proposa que nous y allions durant la soirée et elle se disait d’accord à ce que nous revenions ensemble à l’île. Dans l’immédiat, cette proposition me sembla acceptable, mais sans plus.

À l’arrivée à l’île, je me sentais fatigué et je demandai doucement à Nicole si cela la dérangeait que je revienne sur mon acceptation d’aller au magasin. Elle me répondit que non, sauf qu’elle s’éloigna précipitamment sans que je sache à quoi m’en tenir relativement à la récupération de son vélo : se ferait-elle avec moi ou quelqu’un d’autre. Sa fuite, telle un geste d’évitement, m’embarrassa. Du moins, je me l’expliquais mal et, comme on le dit parfois, la moutarde commençait à me monter au nez.

À cela j’ajouterais d’autres éléments qui s’avérèrent choquants à mes yeux. Dans nos échanges de courriels, je vérifiai auprès d’elle si elle acceptait que je lui installe la ferrure de sa case dévissée lors du vol de son vélo. En outre, ayant remarqué qu’elle possédait un équipement de golf, je l’invitai à jouer avec moi, malgré qu’elle m’ait répondu qu’elle ne pratiquait plus depuis 10 ans. Je n’obtins aucune réponse de sa part à ce sujet. Que penser de son mutisme?

Ce n’est pas tout. Durant le parcours, Nicole me demanda si je pouvais communiquer par téléphone en raison de ma « malentendance ». Oui, lui avais-je répondu. Hier, je lui téléphonai. Vue son absence, je lui enregistrai un message, entre autres les problèmes causés par le vol de son vélo, la récupération de son vélo neuf, et je lui demandai de me rappeler. Toujours pas de réponse. L’adage qui dit que : « Pas de nouvelles, bonnes nouvelles, ne s'appliquait pas dans ce cas ».

Comment interpréter ces attitudes et comportements qui, en d’autres occasions, m’étaient apparus tels ceux d’une personne à problèmes de communication? Si elle croit que je nourris des projets de rapprochement à son sujet, je n’ai rien fait du genre, même si le genre féminin contient un attrait certain chez-moi.

Bref, elle a agi, si ce n’est pas grossièrement (j’entends cavalièrement), du moins maladroitement, quoiqu’elle connaissait mon handicap. Certainement maladroitement, car il arriva parfois que je ne réussissais pas à comprendre ce qu’elle me communiquait ou qu’elle ne terminait pas son explication ou son message ou que la communication était ambiguë et incomplète. Maladroitement, car elle n’a aucunement utilisé les stratégies de communication en cause avec une personne handicapée de l’ouie. Pourtant, sa sœur est handicapée comme moi. Enfin, son comportement d’éloignement et d’évitement, tel que mentionné plus haut, s’expliquerait-il par la honte de se trouver en compagnie d’un malentendant? Je n’ose le croire. Pour le savoir, seule sa validation m’aiderait à répondre à cette question.

Je termine en te disant, cher ami, que « Rien ne me ferait plus plaisir que de discuter avec Nicole de projets initiés, mais sujets à adaptation pour mutualiser convenablement nos occupations, et de savoir comment elle s’en tirait face aux problèmes causés par le vol de son vélo.» J’aime aider et je ne demande rien en retour.

Dans la communication, tout se règle ..., même les craintes ou les gestes les plus fous d’attachement affectif, pourvu qu’il n’y ait pas de gêne entre les personnes communicantes.

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